abraham hadad est né en 1937 à bagdad en irak. Il a fait ces études à l’academy of fine arts de tel aviv (1956-60 / israel) et à l’école national supérieure des beaux-arts de paris (1965-70 / france). le peintre vit et travaille (professeur de l’école national supérieure des beaux-arts de paris) depuis 1965 à paris et st. christol de rodières en france.
vous allez observer ce qui, dans l'apparence sensible des images d'abraham hadad, garde des traces d'un patient labeur ou, au contraire, d'une hâte; ce qui relève, vous semble-t-il, d'un calcul mesuré et ce qui, intentionnellement, s'offre comme un dérapage du pinceau. Vous en observez les marques sur la surface des œuvres peintes ou dessinées. cela vous conduit, peut-être, à vous interroger sur le lien qui existe entre l'œuvre et la vie d'un peintre; entre l'image elle-même et les comportements qui l'ont fait naître.
sans doute vous demandez-vous comment l'artiste en maîtrise les poussées. nul ne détient la clef du mystère de ce que nous nommons "création". on s'approche, pourtant, un peu davantage de l'énigme lorsque l'artiste parle de son travail, du quotidien de son labeur. abraham hadad en parle, il parle sobrement mais avec précision. il maîtrise les questions du "métier", ses techniques. Il a une vision claire des enjeux du travail de l’art, des effets que le peintre peut espérer en obtenir.
parfois, nos obsessions nous malmènent, aux jours de nos rêveries diurnes ou nocturnes. il arrive qu'elles nous fassent peur. l'imagerie d'abraham hadad, ses obsessions imaginaires et la façon dont il en joue, incitent plus souvent à l'apaisement de notre esprit. elles permettent à chacun de nous d'apprivoiser ses propres fantasmes. quand, dans ces œuvres, figurent des êtres monstrueux, leur ressemblance avec nous-mêmes en fait des personnages familiers. peu s'en faut qu'on ne tende la main et qu'on ne les caresse.
nous avons, dans l'enfance, des peurs irraisonnées. il n'est pas vrai que nous les dominions avec l'âge. elles demeurent en nous dans des coins d'ombre. ce sont elles qui font se lever, plus tard et venues on ne sait d'où, des bouffées de peur. l'aspect des monstres qui traversent, comme sereinement, les images d'abraham hadad, permet qu'on les approche sans trembler et voici que nos peurs, elles aussi, nous deviennent choses familières.
on découvre une parenté, non seulement des figures humaines entre elles, mais aussi bien entre ces figures, celles des animaux et les formes elles-mêmes des choses et des lieux. l'impression que tout cela a un air commun, tient à des traits formels constants où s'exprime, en son fond, la pensée du peintre. elle tient aux effets de matière un peu granuleuse, vibrante sous les yeux, qu'il tire de sa manipulation des pâtes colorées ainsi que des grattages irréguliers de la plume chargée d'encre. elle tient aux oppositions, insistantes tant elles déforment les apparences des corps et des choses, entre les droites anguleuses et les lignes incurvées. mais, surtout, ce qui saisit l'œil avant qu'il ne détaille ces traits qui marquent le style de l'artiste. ainsi, tout communique, vif et mort, dans l'univers imaginaire de ce peintre.
les peintures d'abraham hadad défilent sous nos yeux. le peintre fait l'effort de les montrer à peu près dans l'ordre où il les a conçus. mais la curiosité embrouille cet ordre. allant d'une chose à l'autre, les yeux mélangent tout. c'est l'actualité d'une œuvre, ici, qui s'offre à nous. réellement, toutes ces images sont contemporaines. plutôt qu'elles ne forment, entre elles, une suite temporelle, leur ensemble se présente à nos yeux comme un bouillonnement. elles jaillissent l'une après l'autre comme une eau de source dont le jaillissement serait sans commencement ni fin.
nous voici attentif, alors, non à l’histoire de ces œuvres mais à l’élan qui porte et nous emporte à notre tour
marc le bot, extrait du livre "hadad le peintre"